Serge Gainsbourg L'alcool Paroles et Musique: Serge Gainsbourg 1958 "Du chant ═ la une !..." c 1958 - Editions Warner Chappell --------------------------------------------------------------------------------
Mes illusions donnent sur la cour Des horizons j'en ai pas lourd Quand j'ai bosse toute la journee Il ne me reste plus pour rever Qu'les fleurs horribles de ma chambre Mes illusions donnent sur la cour J'ai mis une croix sur mes amours Les p'tites pepees pour les toucher Faut d'abord les allonger Sinon c'est froid comme en decembre
Quand le soir venu j'm'en reviens du chantier Apres mille peines et le corps harasse J'ai le regard morne et les mains degueulasses De quoi inciter les belles a faire la grimace Bien sur y'a des filles de joies sur le retour Celles qui machent le chewing-gum pendant l'amour Mais que trouverais-je dans leur corps meurtri Sinon qu'indifference et melancolie Dans mes frusques couleur de muraille Je joue les epouvantails
Mais nom de Dieu dans mon ame Brulait pourtant cette flamme Ou s'eclairaient mes amours Et mes breves fiancailles Ou s'consumaient mes amours Comme autant de feux de paille Aujourd'hui je fais mon chemin solitaire Toutes mes ambitions se sont fait la paire J'me suis laisse envahir par les orties Par les ronces de cette chienne de vie
Mes illusions donnent sur la cour Mais dans les troquets du faubourg J'ai des ardoises de reveries Et le sens de l'ironie J'me laisse aller a la tendresse J'oublie ma chambre au fond d'la cour Le train de banlieue au petit jour Et dans les vapeurs de l'alcool J'vois mes chateaux espagnols Mes haras et toutes mes duchesses
A moi les petites pepees les poupees jolies Laissez venir a moi les petites souris Je claque tout ce que je veux au baccara Je tape sur le ventre des Maharajas A moi les boites de nuit sud-americaines Ou l'on danse la tete vide et les mains pleines A moi ces mignonnes au regard qui chavire Qu'il faut agiter avant de s'en servir Dans mes pieds-de-poule mes prince-de-galles En douceur je m'rince la dalle
Et nom de Dieu dans mon ame V'la que j'ressens cette flamme Ou s'eclairaient mes amours Et mes breves fiancailles Ou se consumaient mes amours Comme autant de feux de paille Et quand les troquets ont eteint leurs neons Qu'il ne reste plus un abreuvoir a l'horizon Ainsi j'me laisse bercer par le calva Et l' dieu des ivrognes guide mes pas